Information : Simon Fauteux
Montréal, avril 2025 – Richard Séguin sera intronisé au Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens le 4 mai prochain lors du gala de la SOCAN qui aura lieu à la Tohu.
À la fois artiste et citoyen militant, l’empreinte de Richard Séguin sur la société québécoise est multiple et profonde. Entre la tendresse et la colère, il est l’un des plus importants auteurs-compositeurs-interprètes québécois, dont l’œuvre comporte 13 albums solo et sept en collaboration. Il est aussi un ardent défenseur de causes sociales et politiques qui reflètent ses valeurs, basées sur la dignité humaine et la quête de justice.
Richard Séguin sera intronisé par Patrice Michaud alors que Simon Godin, guitariste et comparse de longue date de Richard, Luce Dufault, Vincent Vallières, Ivan Boivin-Flamand, Jeanne Côté et Jorane offriront des performances lors de la soirée.
Richard et sa jumelle Marie-Claire naissent le 27 mars 1952 dans un quartier ouvrier de Pointe-aux-Trembles. Ces caractéristiques, déterminantes, l’amèneront à cultiver son sens de l’équité et du partage entre les individus pour contribuer au bien-être de la collectivité. Là se trouve le socle de son œuvre, de ses prises de parole et de ses gestes citoyens.
À ses 14 ans, il reçoit de son père une guitare, dont il ne se sépare plus. Il chante régulièrement avec Marie-Claire et, en 1969, ils fondent le groupe La Nouvelle frontière. Ils enregistrent deux microsillons avant de se dissoudre en 1971. Dans la mouvance du retour à la terre, Richard trouve peu après sa terre promise à Saint-Venant-de-Paquette, dans les Appalaches.
C’est en 1972 que Richard et Marie-Claire deviennent officiellement Les Séguin et font paraître un album éponyme. Dès la première chanson de la Face A, ils revendiquent et mettent de l’avant leurs préoccupations environnementales et la défense des droits des Premières Nations à travers Som Séguin, qu’ils ont écrite à 16 ans. Jusqu’en 1976, trois autres albums voient le jour : En attendant et les immortels Récolte de rêves et Festin d’amour. Tandis qu’il s’impose comme le porte-étendard d’une génération soucieuse de l’environnement et de l’avenir de la planète, le duo décide d’un commun accord de mettre fin à son association artistique.
Richard prend alors part à un autre projet collaboratif, cette fois avec Serge Fiori, dont le groupe Harmonium s’est lui aussi dissous. Le microsillon culte Deux cents nuits à l’heure de Fiori-Séguin paraît en 1978. Il obtient un retentissant succès critique et populaire, s’écoulant à plus de 200 000 exemplaires. En 1979, au premier Gala de l’ADISQ, il vaut à Fiori-Séguin le Félix du Groupe de l’année et à Deux cents nuit à l’heure ceux du Disque de l’année – Auteur-compositeur-interprète et du Microsillon de l’année.
Cette même année, la carrière solo de Richard Séguin prend son envol avec la sortie d’un album éponyme. Peu après, inspiré par sa rencontre avec la poétesse Louky Bersianik, son souffle créatif le pousse à écrire la musique de l’album Trace et contraste, sur lequel est gravé le classique en devenir Chanson pour durer toujours. Le chanteur l’interprète au Festival de Spa, en Belgique, à l’issue duquel il obtient trois récompenses, dont le Grand prix radiophonique des programmes de langue française.
Comme la plupart des artistes québécois, Séguin négocie difficilement le virage de la décennie suivante. C’est alors qu’une réflexion de l’homme de lettres Michel Garneau ravive sa flamme: « Les mots méritent qu’on les vive, sinon ils ne disent rien et trahissent le réel. » Séguin l’intègre si bien qu’elle le guide dans l’écriture de La raffinerie, qui lui permet de crier la révolte de son père et de toute une génération d’hommes contraints au silence. En 1985, il grave la chanson sur Double vie, qui marque son retour en force, comme l’atteste sa certification or. L’année suivante, il récolte le Félix de l’Auteur et/ou compositeur de l’année et celui de l’Album rock de l’année au gala de l’ADISQ.
C’est lorsqu’il atteint le cap de la mi-trentaine que l’artiste développe son plein potentiel créatif, en même temps qu’il atteint des sommets de popularité. Journée d’Amérique, qui paraît en 1988, le démontre avec éloquence, et se démarque comme l’une des œuvres phares de son corpus, voire de la chanson québécoise. La pièce-titre, L’Ange vagabond, Et tu marches…, Protest Song et Tu reviens de loin comptent parmi les 15 chansons de Séguin qui accéderont éventuellement au statut de Classique de la SOCAN. L’année de son lancement, Journée d’Amérique mérite le Félix du Microsillon de l’année – Pop-rock et décroche un disque platine. La tournée qui en découle est couronnée d’un succès sans précédent, comme l’atteste le Billet d’or que lui remet l’ADISQ et le Prix Miroir du spectacle le plus populaire du Festival d’été de Québec. Le titre Ici comme ailleurs remporte quant à lui le concours Notre chanson, de Radio-Canada.
De Pointe-aux-Trembles à Saint-Venant, chemin faisant, Richard est toujours demeuré intègre et fidèle à ses valeurs humanistes, ce qui lui vaut d’être désigné Artiste pour la paix de l’année 1990. Sensible aux populations habitant loin des grands centres, il prend part pour la troisième fois à la tournée du Réseau des organisateurs de spectacles de l’Est du Québec (ROSEQ) à l’été 1991. Il en profite pour présenter tout le répertoire de son cinquième album, Aux portes du matin, qui paraît quelques mois plus tard. Il mérite le Félix de l’Album de l’année – Meilleur vendeur, alors que le spectacle qui en est inspiré lui permet de récolter le Félix du Metteur en scène de l’année et du Scripteur de spectacle de l’année. Au bout de la route, il l’aura présenté à quelque 150 reprises. Témoin de ce fabuleux périple, l’album live Vagabondage sort en 1993. Aux portes du matin est désignée Chanson de l’Année au Gala de l’ADISQ et lui vaut un prix SOCAN pour être l’une des dix chansons d‘expression française les plus jouées à la radio.
Il lance D’instinct en 1995. Porté par Rester debout, son titre-phare, il est certifié or peu après, tandis que Richard reprend la route au fil d’une longue tournée. Au bout de celle-ci, inspiré par son amour de la marche et de la poésie, il défriche, en collaboration avec la communauté de Saint-Venant, le chemin qui conduira au Sentier poétique, que l’on peut toujours parcourir aujourd’hui. Cette oasis propice à l’introspection et à la réflexion contribue à le faire adopter un autre rythme. Le sentiment d’urgence s’évanouit.
Aussi, il faut attendre l’arrivée du nouveau siècle pour apprécier les nouvelles compositions qu’il partage sur Microclimat. Elles lui valent le Félix de l’Album de l’année – Folk contemporain. Six ans plus tard, il explore une nouvelle forme d’écriture avec Lettres ouvertes. À 15 personnes, dont sa fille et sa jumelle, il adresse des missives mises en musique. Écrites sur le mode personnel, elles ont une portée universelle.
En 2010, pour sa « carrière exceptionnelle d’auteur-compositeur », il est récompensé du Prix Sylvain-Lelièvre, placé sous l’égide la Fondation SPACQ. Plus que jamais inspiré par la terre qu’il a adoptée il y a 40 ans, et dans une volonté de rendre lui hommage, il donne le titre Appalaches à l’album qui paraît l’année suivante. La chanson De colères et d’espoir prête son titre à la série de spectacles qui s’ensuit.
2012 marque le soixantième anniversaire de naissance de Richard. Aussi, pour souligner ses 40 ans de chansons, Spectra Musique met sur le marché le coffret Ma demeure. D’une facture exceptionnelle, il mérite le Félix de l’Anthologie de l’année.
Empruntant un ton intimiste délicatement appuyé par une instrumentation acoustique, il enregistre Les horizons nouveaux et le partage en 2016. À cette époque, il se consacre déjà à un projet qui lui tient particulièrement à cœur et qu’il présentera deux ans plus tard: Retour à Walden – Sur les pas de Thoreau. Cet album-concept rend hommage au philosophe et poète américain Henry David Thoreau, fidèle défenseur de la désobéissance civile, qui a depuis des décennies un fort ascendant sur Séguin.
En 2022, tandis que la pandémie déstabilise et ébranle les certitudes, Richard Séguin, tel un repère, nous ramène à l’essentiel avec Les liens les lieux. L’année suivante, en hommage à sa contribution au développement et au rayonnement de la culture québécoise, il est nommé Compagnon des arts et des lettres du Québec.
À la fois artiste et citoyen militant, l’empreinte de Richard Séguin sur la société québécoise est multiple et profonde. – Texte : Jean-François Brassard
À PROPOS DU PANTHÉON DES AUTEURS ET COMPOSITEURS CANADIENS
Le Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens (PACC), un organisme national et sans but lucratif qui a pour mission d’honorer et de célébrer les auteurs et compositeurs canadiens et ceux qui ont consacré leur vie à l’héritage de la musique. Le PACC s’emploie également à sensibiliser le public à ces réalisations et à encourager la prochaine génération d’auteurs et de compositeurs par le biais d’initiatives et d’événements organisés tout au long de l’année. En décembre 2011, la SOCAN (Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique) a acquis le PACC ; toutefois, le Panthéon continue d’être géré comme une organisation distincte et est dirigé par son propre Conseil d’administration composé de créateurs et d’éditeurs de musique anglophones et francophones, ainsi que de représentants de l’industrie du disque. Le mandat du PACC s’aligne sur les objectifs de la SOCAN en tant qu’organisation de créateurs et d’éditeurs fondée sur ses membres. www.cshf.ca